Santé des animaux et fertilisation des prairies

La fertilisation des prairies permet l’augmentation de la production d’herbe mais aussi le maintien de l’équilibre des sols et la qualité de la prairie. Qu’elle soit utilisée en fauche ou en pâture, de façon extensive ou intensive, une quantité importante de minéraux et d’oligo-éléments sont exportés. 

Globalement, les prairies ne sont pas correctement et suffisamment fertilisées. Les apports d’azote sont généralement bien gérés mais les autres éléments tels que la potasse, le phosphore, le magnésium et le soufre sont trop souvent négligés.  Les sols s’appauvrissent et une acidification de surface est fréquemment observée. Un dysfonctionnement du sol ne permet pas une bonne nutrition de la prairie et des déséquilibres minéraux peuvent s’installer sur les vaches*. Par exemple, un pH faible joue sur la disponibilité du calcium pour les plantes, minéral dont les ruminants ont besoin au quotidien.

blobid0.png

Tableau 1 : Exemple d’exportations sur prairie de fauche intensive. Essai Sud de l'Allemagne

blobid1.png

Tableau 2 : Absorption d’oligoéléments par la prairie selon le mode d’exploitation. Essais Royaume-Uni

Globalement si la fertilisation n’est pas adaptée, les fourrages seront déséquilibrés en minéraux, sucres solubles ou matières azotées, et pourra entrainer chez l’animal différents types de pathologies. Les cas les plus fréquemment observés sont :

Les excès d’azote dans la ration pâturée

Un excès d’azote, par exemple dans une prairie pâturée, entraine un excès d’azote dans le rumen. Le ruminant utilise dans ce cas de l’énergie pour détoxifier au niveau hépatique l’azote en excès. La mobilisation de cette énergie impacte celle disponible pour la lactation ou pour l’engraissement et peut donc entraîner le maigrissement des ruminants qui pâturent, par exemple, des parcelles trop riches en légumineuses** ou ayant reçu de l’azote en excès. Des problèmes de reproduction peuvent aussi être observés lorsque des vaches sont au patûrage dans des parcelles trop riches en azote.

Azote et qualité de l'ensilage

Tout en étant nécessaire pour atteindre de bons rendements et améliorer les propriétés d’ensilage de l’herbe, en quantité excessive, le nitrate dans l’ensilage risque d’avoir des effets nocifs sur la fermentation et entraîner une toxicité aux nitrites lorsqu’on la donne à manger aux bovins. Un ensilage ayant une capacité tampon plus élevée, due à un abus d’azote, met plus longtemps à atteindre un pH bas, ce qui ralentit la fermentation. La MS de l’ensilage sera elle aussi plus faible et il y aura davantage d’effluents produits. Toutefois, à niveau optimal d’azote sous forme de nitrate, le pH est plus faible et le taux d’acide lactique dans le fourrage ensilé est plus élevé, contribuant à un fourrage de meilleure qualité.

imagey3npn.png

Tableau 3 : Niveau de nitrate - qualité de l'ensilage (essais effectués en Allemagne)

En  revanche, lorsqu’il n’y a pas assez de nitrate, cela peut être mauvais pour la fermentation, réduire la formation d’acide lactique et augmenter la formation d’acide butyrique, et ralentir ainsi la baisse du niveau du pH. Si d’un côté un plus grand recours à l’azote diminue le taux de glucides hydrosolubles de valeur dans l’ensilage, de l’autre les formes nitrates ont moins d’effet comparé à l’urée . Lorsqu’il s’agit de faire consommer l’ensilage, la digestibilité risque aussi d’être amoindrie si les taux d’azote sont trop élevés (figure .

La carence en magnésium ou hypomagnésie

Dans un sol, la quantité de certains éléments nutritifs peut faire varier la disponibilité d’autres éléments. Ainsi, la disponibilité du magnésium est inversement proportionnelle à celle de la potasse. Un sol trop riche en potasse, où le rapport K/Mg est trop déséquilibré induit une réduction de l’absorption du magnésium. La carence en magnésium se traduit par une chute de sa concentration sanguine, alors que cet élément est indispensable car il assure des fonctions structurelles et stimulatrices. Une carence sévère peut aboutir à une tétanie d’herbe : signes nerveux, tremblements, raideur dans la démarche et parfois mort de la vache.

Réponse au besoin sélénique des troupeaux

Une teneur insuffisante en sélénium des fourrages et notamment des foins - en dessous du seuil de 0,1 mg Se/kg MS - est fréquemment observée en France. Dans ces cas, l'apport de sélénium par la prairie ne répond pas aux besoins en sélénium des ruminants (en dehors de la période de fin de gestation où ils sont jugés plus élevés).  Si les besoins ne sont pas couverts, le troupeau est exposé à un risque accru de maladies Chez les animaux, et en particulier les ruminants, il favorise la bonne santé du troupeau, donc une bonne productivité. En revanche, quand les besoins en sélénium des animaux ne sont pas couverts, cela peut entraîner des problèmes d’immunité, de croissance, de reproduction… Chez les veaux et les agneaux, les symptômes les plus flagrants sont une mauvaise croissance, des diarrhées, voire la « maladie des muscles blancs », également appelée chez les jeunes ovins « raide de l’agneau ». Cette maladie se traduit par un faiblesse musculaire généralisée et une insuffisance cardiaque. Chez les vaches laitières et allaitantes, la carence en sélénium augmente le risque et la durée des mammites.

 

* : Dans le cas d’une prairie de mélange, un déséquilibre minéral du sol impacte (la population) la composition floristique de la prairie car les différentes espèces sont plus ou moins exigeantes en minéraux. Certaines espèces seront donc forcément défavorisées et ne s’exprimeront pas comme attendu, ce qui déséquilibrera la composition du fourrage, donc sa valeur alimentaire, par rapport à ce qui était attendu.