Volatilisation ammoniacale

L'urée inhibée volatilise moins que l'urée et la solution azotée mais encore 2 à 4 fois plus que les ammonitrates.

Le débat environnemental est au cœur des enjeux de la fertilisation azotée. La France ,comme tous les états membres de l’union européenne ainsi que le Royaume-Uni, s’est engagé dans le cadre de la directive NEC (National Emission Ceilings) à réduire ses émissions des principaux polluants atmosphériques : ammoniac , dioxyde soufre, oxydes d’azote. Pour l’ammoniac, dont l’agriculture est le principal responsable avec 94% des émissions en Europe, la France devra réduire ses émissions de 4% en 2020, de 8% en 2025 et de 13% en 2030 par rapport à 2005. Ces objectifs de réduction pour la France sont significativement plus faibles que certains de nos principaux voisins, ainsi l’Allemagne devra baisser ses émissions de 29% en 2030 et les Pays-Bas de 21%. L’objectif moyen de réduction au niveau européen est de 19%. En France, le décret PREPA de mai 2017 (Plan national de Réduction des Emissions de Polluants Atmosphériques) fixe les objectifs à atteindre tandis que l’arrêté correspondant établit ,entre autres, les mesures applicables à l’agriculture pour parvenir à atteindre les objectifs.
Au niveau européen, l’élevage est responsable de 75% des émissions d’ammoniac tandis que l’usage des engrais minéraux représente 22% des émissions.
Dans le cas de la France, la solution azotée et l’urée représente 80% des émissions provenant des engrais minéraux alors qu’ils représentent 52% de l’azote minéral utilisé. A l’inverse, les ammonitrates ne représentent qu’un peu plus de 10% des émissions d’ammoniac pour 36% de l’azote utilisé. Ces dernières années, les émissions d’ammoniac de l’agriculture française sont reparties à la hausse et s’expliquent directement par le développement de l’utilisation des urées et des solutions azotées importées des pays à bas couts de production. Depuis 2005, les émissions françaises ont augmenté de 3 à 4% en totale opposition à la trajectoire fixée. Ainsi, le premier palier de réduction fixé à 4% en 2020 sera clairement impossible à atteindre.
Les ammonitrates sont beaucoup moins émissifs que les engrais à base d’urée (urées et solution azotée) comme le montre les facteurs d’émissions établis par l’EMEP/EEA (European Monitoring and Evaluation Programme de l’Agence Européenne de l’Environnement ) régulièrement établis.
Quels leviers de réductions des émissions d’ammoniac provenant les engrais minéraux ?
Différents leviers d’action existent et sont identifiés depuis de nombreuses années sans toutefois que leur déploiement ne soit très large :

  1. Incorporation / enfouissement des formes d’azote uréiques : Cette technique possible sur les cultures de printemps (maïs ,orge de printemps, pomme de terre , betterave, tournesol,) au moment de l’implantation n’est pas toujours utilisée à son maximum . Elle est plus délicate pour des apports en végétation bien que praticable sur maïs dans certaines zones du Sud-Ouest. L’enfouissement n’est pas réaliste sur cultures d’hiver (céréales , colza) ou prairie.
    L’incorporation doit être profonde (10-15 cm) pour être efficace et permet de réduire jusqu’à 90% les émissions. Aujourd’hui seulement 2% de la solution azotée et 11.4% de l’urée sont effectivement enfouis (enquête pratiques culturales SSP MAA 2011).

  2. Utilisation d’inhibiteur d’uréase : l’ajout de ces additifs chimiques (le N-(n-butyl) thiophosphoric triamide étant le plus connu et utilisé aujourd’hui) permet une réduction estimée à 70% des émissions d’ammoniac pour l’urée mais seulement de 40% pour la solution azotée (Guidance from the UNECE Task Force on Reactive Nitrogen / TFRN/ LRTAP). Connus depuis une trentaine d’années aux Etats-Unis, ces additifs commencent à être utilisés en Europe et en France depuis quelques années.
    Les urées inhibées initialement introduites sur le marché comme des substituts commerciaux aux ammonitrates viennent améliorer le profil environnemental des urées.
    Notons qu’en France aujourd’hui, l’utilisation des inhibiteurs dans la solution azotée par l’agriculteur n’est pas possible , l’ANSES n’ayant pas délivré d’autorisation de mise sur le marché à cette fin. Par ailleurs, l’ANSES à la demande des pouvoirs publics procède actuellement à une vaste évaluation des conséquences au niveau national de l’usage massif des inhibiteurs dans les engrais minéraux uréiques.
    Il convient de se rappeler que l’urée inhibées émettent encore 3 à 4 fois plus d’ammoniac que les ammonitrates.

  3. Les engrais enrobés à libération retardée (urées enrobées par des polymères) constituent également une alternative bien que leur efficacité d’abattement soit plus modeste et estimée autour de 30%.

  4. L’irrigation suivant l’épandage d’azote est également un levier d’action : au moins 10-15 mm sont nécessaires mais cette technique reste inféodée à la présence de matériel d’irrigation et d’un ressource en eau suffisante.

  5. Remplacement de formes d’engrais les plus émissives par des ammonitrates.

Cette solution évidente dont l’efficacité est évaluée à plus de 90% d’abattement doit faire partie des leviers à considérer surtout dans les conditions pédoclimatiques les plus favorables à une volatilisation intense : sols à pH élevé, apport tardif en végétation, enfouissement impossible.

Part de l'agriculture dans les émissions totales d'ammoniac en Europe (à gauche) et détail des émissions provenant del'agriculture (à droite).

Facteur d'émission d'ammoniac pour différents types d'engrais apportés sur sol normal (pH≤ 7)

Contribution des engrais minéraux aux émissions d'ammoniac en Europe (2014) et en France (2015) en fonction de leur consommation. L'urée et la solution azotée sont les principaux engrais émetteurs.

 

Pertes par volatiisation cumulées pour différents engrais-essai en sol acide (pH 5,8).

Pour plus d'information consulter pur nutriment infos : " A quoi servent les inhibiteurs ? "

Pour en savoir plus 

 

 

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Livre blanc sur l'utilité des inhibiteurs

A quoi servent les inhibiteurs ?

Les inhibiteurs d’uréase existent depuis plus de 25 ans mais on observe depuis quelques temps, un intérêt croissant pour ces produits qui pourrait remédier à certains défauts de l’urée et de la solution azotée. Ces additifs tiennent-ils leurs prommesses ? Dans quelles conditions peuvent-ils être utilisés ? Quel est leur intérêt sur le plan économique ?

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