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20 janvier, 2017

Fertilisation du colza, quelles sont les bonnes pratiques ?

Une vaste enquête a été menée en Octobre 2016 auprès de 300 producteurs cultivant au minimum 10 ha de colza et répartis dans 3 grandes régions au Nord de la Loire (zone représentant 80% de la sole française de colza). L’objectif était d’analyser les pratiques courantes de fertilisation sur le colza afin de repérer quels seraient les leviers permettant d’améliorer la productivité, et donc d’optimiser le revenu de l’agriculteur.


Une agricultrice dans un champ de colza
Une agricultrice dans un champ de colza

La France est le 1er producteur européen de graines de colza (en 2015 selon Oleopro avec 25% de la production) avec des surfaces variant entre 1.4 et 1.6 millions d’hectares sur les dix dernières années, ce qui représente environ 5% de la SAU.

Carte sur la répartition de production de colza en FranceLes trois grandes régions de production du colza

Pour une grande partie des agriculteurs interrogés lors de cette étude, le colza est cultivé car il s’agit d’un très bon précédent (pour implanter du blé tendre notamment) et d’une bonne tête de rotation. Cette culture devrait donc bénéficier d’un programme de fertilisation optimal pour à la fois subvenir à ses besoins importants (en éléments majeurs NPK mais aussi en éléments secondaires et oligo-éléments) , et préparer la réussite de la culture suivante.

Or, l’analyse des pratiques courantes montre qu’il existe des marges de progression en terme de gestion de la nutrition du colza.

La fertilisation du colza : un facteur jugé important

Même si la fertilisation du colza n’est pas perçue comme étant le critère de réussite le plus important, le levier «conditions de semis » cité en premier par le panel de producteurs peut avoir un lien intéressant. L’apport d’un engrais « type NP » en localisé, permet de booster le démarrage du colza pour passer rapidement au-delà des stades sensibles aux attaques de ravageurs  (limaces et altises notamment). Or, seuls 3% des agriculteurs ont réalisé un apport localisé lors du semis.

Le fractionnement en trois apports d’azote n’est pas encore monnaie courante (31% des cas dans cette étude) mais permet pourtant de mieux répartir la dose en fonction des besoins du colza et selon son stade de développement.

Concernant le choix de la forme d’azote, la solution azotée est préférée par 47% des producteurs. Or, il s’agit de la forme la moins efficace ! Les essais (courbes de réponse à l’azote) menés entre 2008 et 2012 montrent un écart de rendement de 6% ou 2.3 qx/ha en faveur de l’ammonitrate par rapport à la solution azotée.

En prenant un rendement de référence de 3.4 T/ha, une hypothèse de dose totale de 177 unités de N, et un prix du colza départ ferme de  375€/T, le gain moyen serait de 25 €/ha avec l’utilisation de l’ammonitrate (hypothèse de prix qui ne correspondra pas forcément à la réalité régionale et à la date de parution de l’article : solution azotée à 190 €/T livr. ferme et ammonitrate à 310 €/T liv. ferme).  Il s’agit donc bien d’un investissement dans la forme d’azote pour dégager davantage de valeur à la récolte.

De plus,  l’ammonitrate est agronomiquement plus efficace que la solution azotée, ce qui se traduit pas une dose optimale d’azote plus faible. Les simulations réalisées sur les essais ont montré qu’il était nécessaire d’augmenter la dose de solutions  azotée de plus  de 20% pour atteindre les mêmes performances que l’ammonitrate. Bien évidemment de telles augmentation de doses ne sont pas sans conséquences environnementales. Valorisé à plus de 50% dans les filières biocarburant, le diester de colza doit démontrer sa « durabilité » en réduisant de plus de 50% les émissions de gaz à effet de serre comparé au gazole, il est alors capital d’utiliser les formes d’azote efficaces et peu émettrices de CO2 telle que l’ammonitrate.

 

L’importance d’une nutrition complète 

La fertilisation du colza ne s’arrête pas à l’azote et au choix de sa forme, les apports de phosphore, potasse, soufre et oligo-éléments doivent aussi être raisonnés.

Or, la connaissance des agriculteurs reste faible sur ces catégories d’engrais et de nombreuses impasses sont faites par les producteurs, générant de fausses économies.

Le colza est une culture très exigeante en phosphore, actuellement ,les grandes régions de culture du colza connaissent une baisse des teneurs en Phosphore des sols qui peuvent déjà avoir localement un impact sur le rendement. (étude bdat INRA UNIFA 2016).

Seules 15% des surfaces de colza ont bénéficié d’un apport de bore, pourtant indispensable à sa bonne conduite. 70% des surfaces ont reçu du soufre alors qu’il devrait être utilisé systématiquement, 36% ont eu du phosphore, 32% de la potasse, 5% du magnésium et 3% du molybdène. 76% des producteurs questionnés disent pourtant que le coût de la fertilisation est justifié par les gains de rendement qu’elle apporte.

La simple utilisation d’un engrais complexe NP+S ou NPK+S permettrait de couvrir les besoins en azote, phosphore, potasse et soufre en un seul passage au plus près des besoins de la plante, tout en bénéficiant de la forme nitrique et de la synergie des éléments.

Pour les autres éléments, le recours à la nutrition foliaire avec une formulation spécifique colza est un choix judicieux. Il existe ainsi des produits composés d’éléments clés pour la culture du colza : magnésium, bore, manganèse et molybdène.

 

Le bon engrais au bon moment

Le rendement du colza est conditionné par son état de développement avant l’hiver et par sa bonne reprise de végétation au printemps. Un apport foliaire d’automne se justifie pour la mise en réserve des éléments dans le collet. Cet organe est un « espace de stockage » où sont mis en réserve les éléments minéraux pour assurer une meilleure résistance au froid (gage d’un nombre supérieur de plantes en sortie d’hiver). Le complément en foliaire au printemps permettra quant à lui de booster le redémarrage de la plante même en conditions difficiles (humidité, froid etc.). 

Enfin, le recours aux outils d’aide à la décision reste une solution actuellement utilisée vis à vis du respect de la réglementation mais il y a en réalité encore peu de pilotage. Pourtant, les données issues d’outils permettant de mesurer l’absorption d’azote durant l’hiver devraient aboutir à une meilleure évaluation des besoins du colza.  Enfin la modulation intra-parcellaire du premier apport d’azote, permettrait de mieux gérer la forte variabilité souvent rencontrées au sein des parcelles de colza. L’analyse de sol, et l’analyse foliaire, constituent aussi des outils de pilotage très utiles pour gérer au mieux la nutrition du colza sur le moyen et  long terme.