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21 octobre, 2021

L’engrais azoté le moins cher n’est pas le plus rentable

Moindre empreinte environnementale, meilleure efficacité agronomique : on ne compte plus les avantages des ammonitrates face à l’urée ! Mais qu’en est-il de leur performance économique à l’heure où les achats d’engrais font plus que jamais l’actualité ? Dans un contexte de flambée du prix des engrais inédit à ce jour, faut-il se fier uniquement au coût de l’unité d’azote pour faire le bon choix ?


champ maïs
champ maïs

Du fait de leur moindre volatilisation ammoniacale (moins de 2 % de l’azote apporté avec l’ammonitrate contre plus de 13% pour l’urée[1]), les ammonitrates sont un levier incontournable pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de NH3 d’ici 2030[2]. Selon une étude UNIFA/CITEPA[3] publiée en 2018, l’urée, si elle n’est pas systématiquement enfouie ou additionnée d’un inhibiteur d’uréase sur toutes les cultures, devra ainsi être remplacée par des ammonitrates dans des proportions au moins équivalentes à celles des années 2000.

La mise en œuvre de ces techniques de réduction s’accompagnant d’un coût supporté par les agriculteurs (de l’ordre de +20% pour l’unité d’azote d’ammonitrate par rapport à celle d’urée), le groupe de travail ADA de l’UNIFA s’est intéressé récemment à l’impact de la forme d’azote sur le revenu des exploitations. Dans cette étude technico-économique[4], ce sont 15 années de prix des engrais et des cultures qui ont été rapprochées de 220 résultats d’essais comparant ammonitrate et urée pour simuler 3300 situations sur 4 grandes cultures : colza, blé tendre, orge d’hiver et maïs grain. Bien que les prix actuels n’aient jamais été rencontrés sur la période 2005-2019, y compris en 2008-2009, cette étude constitue une démonstration particulièrement robuste et représentative du marché français.

Les résultats de la comparaison entre ammonitrate et urée sont sans appel ! Malgré un surcoût de l’unité d’azote par rapport à l’urée, l’ammonitrate sort gagnant aussi bien à l’échelle de la culture que de la rotation triennale grâce à ses meilleures performances agronomiques (absorption plus importante de l’azote, rendement supérieur, meilleure qualité).

Le gain de marge est particulièrement remarquable sur colza et maïs grain, avec respectivement +63 €/ha et +73 €/ha en moyenne sur 15 ans. Les écarts atteignent même jusqu’à +96 €/ha sur colza et +113 €/ha sur maïs selon les contextes de prix annuels. Ce gain de marge est loin d’être un phénomène ponctuel puisque l’utilisation d’ammonitrate engendre une marge supérieure à l’urée dans 75%% des situations simulées en colza et 72% en maïs grain. Finalement, chaque année en moyenne sur la période 2005-2019, la différence est toujours en faveur de l’ammonitrate et aux dépens de l’urée.

 

Figure 1 : Ecart de marge moyen par année et sur 15 ans entre ammonitrate et urée obtenus sur colza (à gauche) et maïs grain (à droite). Résultats s’appuyant sur 59 essais colza et 47 essais maïs grain menés en France comparant ammonitrate et urée, mis en regard des cours des engrais et de la culture pour 15 années = 885 situations simulées sur colza et 705 sur maïs. Source : étude ADA – UNIFA (2021).

Le gain de marge sur céréales à paille, s’il n’est significatif que 10 années sur les 15 étudiées, reste néanmoins en faveur de l’ammonitrate : +12 €/ha sur blé tendre et +15 €/ha sur orge d’hiver en moyenne sur 15 ans. Qu’en est-il finalement de la rentabilité économique des ammonitrates dans le temps ? Combiné aux excellentes performances montrées sur colza et maïs grain, il en résulte en moyenne un gain de marge de +30 €/ha/an pour une rotation colza-blé-orge et +33 €/ha pour une rotation maïs-blé-orge.

Figure 2 : Synthèse des situations simulées et des gains obtenus avec l’ammonitrate par rapport à l’urée sur 4 grandes cultures (source : Etude ADA-UNIFA, janv. 2021)

Avec les ammonitrates, efficacité agronomique et diminution des impacts environnementaux riment avec rentabilité économique. Alors que les engrais affichent des prix élevés avec une faible probabilité de baisse d’ici le printemps, ne serait-il pas préférable de choisir la forme d’engrais pour laquelle :

  • chaque unité d’azote est valorisé en rendement ?
  • aucune n’est gaspillée par volatilisation ammoniacale ?
  • toutes se traduisent par un gain de marge ?

 

[1] Source : EMEP/EEA air polluant emission inventory guidebook 2016 / 2019.

[2] Les leviers d’action pour réduire les émissions de NH3 en agriculture ont été identifiés et recensés dans le Guide des bonnes pratiques agricoles pour l’amélioration de la qualité de l’air (Ademe, 2019).

[3] Etude menant une analyse prospective des émissions d’ammoniac associées à l’utilisation des engrais azotés minéraux à l’horizon 2030 et de leurs conséquences sur la probabilité d’atteindre les objectifs globaux.

[4] Etude technico-économique comparative de 3 formes d’engrais azoté minéral sur 4 grandes cultures, ADA-UNIFA, janv. 2021